Une simple parole est un film documentaire sénégalais sorti en 2014 réalisé par Khady et Mariama Sylla et produit par Guis Guis Production. Il est disponible pour les abonné·es de la plateforme Tenk jusqu’à début février 2026.
Billet d’Elvire Bornand
Une mer calme et scintillante que traverse une embarcation, c’est sur ces images que s’ouvre Une simple parole le documentaire que les soeurs Khady et Mariama Sylla consacrent à leur grand-mère.
Une mer calme qui berce des embarcations immobiles, c’est cette fois le premier plan du teaser du documentaire Khady Sylla, La fille de l’eau, en cours de réalisation, que Mariama consacre à sa soeur, autrice et réalisatrice, morte avant la sortie d’Une simple parole.
Nous qui sommes invité·es ici au festival de Ouagadougou dans la rubrique Panorama du cinéma africain nous n’avons même pas le billet pour venir à Ouaga présenter nos films. Je voudrais dire simplement à tous ces businessmen qui sirotent dans des salons et qui font des colloques que quelles que soient les conditions dans lesquelles ils nous mettrons nous ferons notre travail. Parce que notre travail se trouve dans la résistance. Je citerai un de mes amis, en train d’écrire justement un livre sur la résistance, « L’histoire, c’est dégueulasse. »
Khady Sylla
Je suis bouleversée, en tant que soeur, par ce qu’a dû traverser Mariama Sylla en achevant seule le montage d’un film consacré à ce que nous conservons comme traces de ce qui n’est plus, portée par ces mots de Khady Sylla « on quitte toujours quelque part pour quelque part.«
En allant à la rencontre de leur grand-mère dans une région rurale du Sénégal, elles reviennent vers un lieu, qu’adolescentes en vacances, elles avaient envie de quitter sitôt arrivées pour retourner à Dakar. Elles aimeraient aujourd’hui faire ce voyage impossible vers l’enfance pour s’imprégner des traditions orales, réaliser l’importance d’écouter sa grand-mère raconter l’histoire des ancêtres et convoquer les morts en récitant leurs noms. L’écouter et s’en souvenir pour en continuer la transmission.
Cette parole leur semble menacée par l’écriture. « Qui va continuer à chanter la lignée ? » interrogent-elles, elles qui sont « la deuxième génération de l’écriture. « . La première génération a délaissé les campagnes pour la ville, l’écriture et un style de vie occidental.
On les suit à la rencontre de récits oraux parlés et chantés mais aussi de gestes culinaires et médicinaux. Ce documentaire nous plonge dans ce qu’est l’ancestralité : le devenir ancêtre par les morts et la remémoration active des disparus de la lignée par les vivants.
L’ancestralité est traitée comme une forme de résistance non pas tant à la modernité qu’à l’exploitation et à la relégation. “Avant qu’on nous humilie nous retournons faire ce que faisaient les ancêtres. “ confie un homme revenu cultivé la terre après avoir tenté de survivre de petits boulots à Dakar.
« Tout se perd. tout doit disparaitre. » nous disent les réalisatrices tout en faisant des baobabs et de la mer des figures d’éternité vivante.
Le documentaire Une simple parole est visible ici sur abonnement ou à la demande.