In a Violent Nature est un film de Chris Nash sorti au cinéma… aux environs de jamais. Ça va mal pour le cinéma d’horreur. Ce film, Grand Prix du festival de Gerardmer, est sorti directement sur les plateformes de streaming, début février 2025 sur Insomnia (Canal +) pour la France.
Il s’agit du premier long métrage de Chris Nash en tant que réalisateur. Il a beaucoup travaillé dans les effets spéciaux ces 20 dernières années et cela se retrouve carrément dans l’attention portée en rendu visuel et esthétique du film.

Dans mes billets je ne fais pas de critiques de film, je regarde le film avec le chat pour analyser ce que les films de genre nous apprennent des mondes dans lesquels nous vivons. Et pour cela, je divulgâche TOUT et pas dans le bon ordre. Lisez à vos risques et périls, vous avez été prévenu·es.
Il y a plusieurs décennies, alors que la forêt appartenait à un seule entreprise d’exploitation forestière, le fils du commerçant a été victime des bucherons furieux des prix pratiqués par son père. Les bucherons lui ont promis un sac de billes s’il montait au sommet de la tour de feu. L’homme, un adulte souffrant d’un trouble des compétences intellectuelles, est monté au sommet de la tour où un bucheron l’a effrayé avec un masque de pompier. La peur lui a fait faire une chute mortelle. Son père a essayé de le venger et les bucherons l’ont tué également.
Depuis, à intervalles réguliers, un grand massacre se produit dans la forêt.


Le film s’ouvre sur fond noir. On entend des bruits de pas et des voix d’hommes qui parlent de la tour de feu en ruines. Celle-ci apparaît à l’écran, d’abord comme une image fixe puis la caméra se déplace jusqu’à un collier enroulé autour d’une grande tige métallique. Contre l’avis de ces amis, un des hommes prend le collier.
Peu de temps après, les feuilles commencent à bouger, puis une main sort de terre avant qu’un homme émerge à l’endroit où se trouvait la tige métallique.
Le massacre peut commencer.
Mais doucement.
Le revenant marche jour et nuit guidé par les bruits de la forêt et de la route. Rien ne l’arrête. Il veut récupérer le collier qui appartenait à sa mère et tuer toutes celles et ceux qui croisent sa route. Le film n’est pas tourné du point de vue des victimes mais de celui du tueur. On part littéralement en randonnée mortelle avec lui.
Sa marche est lancinante mais pas chancelante. L’homme est massif, grand et doté d’une force non-humaine. Il ne s’arrêtera dans sa quête sanguinaire que deux fois. Une première pour explorer le bureau des Rangers et y récupérer, dans une vitrine historique, un vieux masque de pompier dont il couvrira son visage. Une seconde fois lorsque l’un des jeunes hommes qu’il pourchasse laisse tomber un porte-clef en forme de petite voiture. il jouera avec au pied d’un arbre avant de le broyer… le porte-clef… le jeune homme je ne me souviens plus comment il meurt. Autant vous le dire donc, je n’ai pas vraiment fait attention aux différentes manières dont les victimes trouvent la mort. J’ai trouvé que le réalisateur s’en désintéressait et j’ai décidé de faire pareil.
Je vous mets la bande annonce parce que je ne peux pas intégrer la scène que j’aimerais vraiment vous montrer, elle est ici. C’est la mort de la jeune femme qui fait une séance de yoga face au paysage. La première partie de la scène s’inscrit dans les codes du slasher. Le tueur s’approche par derrière. Elle est détendue croyant que c’est son amie qui l’a rejoint. Elle lui parlée manière insouciante et ne réalise que trop tard qu’il s’agissait en fait d’un tueur-masqué-sanguinaire-récemment-sorti-de-sa-tombe. Si la scène continuait dans le respect des codes du genre, la jeune femme devrait courir dans la forêt, pourquoi pas avec un sein s’échappant de son t-shirt, puis être rattrapée et mise à mort de manière singulière, le tueur transformant en armes tous les objets du quotidien se trouvant à sa portée.
Si la mort dans cette scène est singulière, elle est aussi extrêmement rapide, la victime ne fuit pas et grand-guignolesque, le tueur courbe la victime _ qui faisait du yoga, ah, ah _ et fait ressortir sa tête dans le bas de son dos.
Ajoutons que d’un bout à l’autre de la scène, il fait jour. Alors que la pénombre joue un rôle important dans les mécanismes de peur des films d’horreur.
Le film ne cherche jamais à faire peur, ni à dégouter, les scènes de brutalité meurtrière ayant un fort parti pris esthétique autour du sang et des viscères qui s’écoulent.
Mais alors, de quoi donc est-il question ? D’un propos philosophique conservateur et nihiliste sur la nature des animaux et des hommes.

Tout au long du film, il est question de la sauvagerie : celle de la nature tout d’abord dans laquelle marche le tueur. La forêt est épaisse, bruyante, sans fin. Elle regorge de pièges naturels (ravin, lac) et de pièces à gibiers posés par les hommes. Sauvagerie des hommes donc ensuite, à l’égard des animaux et des autres hommes, à l’instar des bucherons qui ont tué le tueur (oui je sais, c’est contre-intuitif) et son père ou des étudiants en week-end qui s’emparent sans réfléchir d’un collier qui ne leur appartient pas. Sauvagerie des animaux enfin, qui se dévoreraient entre eux juste pour le plaisir. Bref l’homme est un loup pour l’homme comme a dit l’autre, c’est-à-dire que la méchanceté et l’égoïsme seraient naturels.
Animalité et humanité se rejoignent dans la figure du monstre qui démontre sa bestialité du début à la fin. Son renoncement à l’humanité est caractérisée par la dissimulation de son visage derrière un masque mais aussi par son absence de rationalité.
Il fait les choses mécaniquement.
Il marche.
Il tue.
Et le film s’achève avant que l’histoire ne se conclut parce qu’il n’y avait pas de début, pas de fin, pas de raison, juste de la violence. Parce que c’est la nature.
Ce film renie toute considération sociale. On notera d’ailleurs les réflexions sur la cancel culture dans la scène du feu de camp.